Selon les statistiques, en France, 130 personnes par jour sont victimes d’un arrêt cardiaque soit environ 50 000 individus par an. Toutefois, même si une réaction prompte (entre 3 et 5 minutes) peut sauver la victime, le taux de survie est très faible : seulement 5 %. C’est pourquoi en vertu des nouvelles réglementations, l’équipement en défibrillateur est devenu obligatoire pour plusieurs ERP. Quels sont les établissements concernés ? Quelles sont leurs obligations ?
Qu’est-ce qu’un défibrillateur automatisé externe (DAE) ?
Un défibrillateur DAE est un dispositif médical qui permet de réanimer la victime d’un arrêt cardiaque par électrochocs. Son utilisation s’accompagne d’un massage cardiaque, ce qui permet d’optimiser les chances de survie de la victime : environ 10 fois plus.
Un défibrillateur automatisé externe peut être semi-automatique. Dans ce cas, l’électrochoc est déclenché par l’utilisateur qui le libère à l’aide d’un bouton sur commande de l’appareil. Par contre, si le défibrillateur est entièrement automatisé, c’est l’appareil lui-même qui se charge de délivrer le choc en cas de besoin.
Tous les défibrillateurs sont dotés d’une assistance vocale qui guide l’utilisateur à travers les différentes étapes : massage, mise en place des électrodes, etc. Il revient à l’appareil de décider après diagnostic si un électrochoc est nécessaire ou non.
Il faut noter que le DAE étant un dispositif médical, il doit donc impérativement comporter la mention CE conformément au règlement 2017/745 de l’UE relatif aux dispositifs médicaux.
Par ailleurs, le décret n°2007-705 du 4 mai 2007 stipule que toute personne est habilitée à se servir d’un défibrillateur. Pour augmenter les chances de survie de la victime, il est utile de respecter la chaîne de survie.
La chaîne de survie est constituée de 4 maillons :
- appel d’urgence ;
- massage cardiaque ;
- défibrillation précoce ;
- prise en charge médicalisée.
En outre, une signalétique défibrillateur est indispensable pour permettre un repérage facile de l’appareil.
Obligation d’équipement pour les ERP
L’obligation d’équipement des ERP en défibrillateur a été mise en œuvre par les décrets du 19 et 27 décembre 2018. Ces derniers viennent mettre en application la loi relative au DAE adoptée le 28 juin 2018.
En vertu du décret du 19 décembre 2018, tous les ERP de catégories 1 à 3 capables d’accueillir plus de 300 personnes (visiteurs et employés compris) ont depuis le 1er janvier 2020 l’obligation de s’équiper en défibrillateur. Il s’agit entre autres des grands magasins, entreprises et hôtels. Les collectivités locales avec la même capacité d’accueil sont également concernées par la nouvelle réglementation.
Pour les ERP de catégorie 4 (capacité d’accueil de 300 personnes), l’obligation de posséder un défibrillateur entre en vigueur à partir du 1er janvier 2021.
Pour ce qui est des ERP de 5e catégorie (capacité d’accueil inférieure à 300 personnes, salariés exclus), la date d’entrée en vigueur du décret est fixée au 1er janvier 2021. Pour cette dernière catégorie, sont concernés :
- les établissements accueillant les personnes du troisième âge ;
- les établissements dédiés aux personnes en situation de handicap ;
- les structures de soins ;
- les refuges et les hôtels-restaurants situés en altitude ;
- les salles sportives polyvalentes ;
- les petites gares.
Par ailleurs, conformément au décret du 27 décembre 2018, il revient au ministère de la Santé d’assurer l’administration, l’exploitation et la constitution d’une base de données nationales relatives aux DAE. Les établissements possédant des défibrillateurs automatisés sont donc tenus de communiquer au ministère les informations les concernant : lieu d’implantation et accessibilité.
Obligation d’équipement pour les entreprises
Selon les dispositions de l’article R. 4224-14 du Code du travail, l’employeur a pour obligation d’équiper les locaux de son entreprise en matériel de premiers secours. Toutefois, cette obligation ne concerne pas directement les défibrillateurs, mais plutôt les trousses de secours.
Néanmoins, en cas d’accident cardiaque, l’employeur peut voir sa responsabilité civile engagée. En effet, il lui revient d’assurer la santé physique de ses employés.
Plusieurs facteurs permettent d’évaluer la violation ou le respect de l’obligation de sécurité par l’employeur. Il s’agit entre autres des éléments suivants :
- nombre important d’employés de plus de 50 ans ;
- grand nombre de salariés exécutant des tâches purement physiques ;
- l’existence avérée de risques d’électrocution ou de noyade ;
- la présence de sources de chaleur avec des pics de températures ambiantes ;
- la non-proximité d’un centre de secours.
Il revient à l’employeur d’évaluer, avec un médecin du travail et les membres du CHSCT, la présence ou non de facteurs ambiants dangereux pouvant entraîner une crise cardiaque.
Par ailleurs, pour tout établissement de plus de 20 travailleurs, la présence de sauveteurs secouristes est obligatoire. Il en est de même pour les chantiers sur lesquels interviennent plus 20 ouvriers pour une durée de plus de 15 jours et où sont réalisés des travaux dangereux. On peut donc dire que la présence d’un défibrillateur est tacitement obligatoire.
En outre, selon le Code du travail, la présence d’une infirmerie est obligatoire dans toutes les entreprises industrielles d’au moins 200 salariés et dans toutes les entreprises commerciales d’au moins 500 travailleurs. Dans ce cas, équiper l’établissement d’un défibrillateur est une question de bon sens.
Obligation d’afficher un panneau de signalisation DAE
L’Arrêté du 29 octobre 2019 abroge les dispositions de l’Arrêté du 16 août 2010 sur la signalisation des défibrillateurs.
Conformément aux dispositions du nouvel arrêté, les exploitants des ERP ont l’obligation de :
- appliquer un pictogramme de sécurité parfaitement visible à chacune des entrées de l’établissement. L’affiche de signalisation doit être au format minimum de 15 x 10 cm ;
- indiquer l’emplacement du DAE et le chemin pour y accéder grâce des pictogrammes de sécurité au format minium 10 x 15 cm et 30 x 10 cm. Les affiches de signalisation doivent être installées de manière ostensible et être en nombre suffisant pour permettre d’accéder facilement à l’appareil ;
- apposer à proximité ou sur le boîtier un pictogramme au format minimum de 10 x 15 cm de façon à ce que le défibrillateur et ses témoins soient visibles. L’étiquette doit mentionner le modèle de l’appareil, le nom du fabricant ainsi que la date de la prochaine maintenance. Par ailleurs, les informations qui y figurent doivent constamment être mises à jour.
Quel emplacement pour un DAE ?
Conformément aux dispositions de l’arrêté du 29 octobre 2019 en son article 3, l’emplacement d’un DAE doit être facile d’accès. De même, il doit favoriser une utilisation permanente de l’appareil par quiconque se trouvant au sein de l’établissement.
En effet, pour sauver la victime d’une crise cardiaque, les gestes de premiers secours doivent être réalisés dans les minutes qui suivent l’accident. C’est pourquoi il est important que le défibrillateur DAE soit réellement accessible à tous.
Cependant, dans un ERP, l’appareil peut facilement être dérobé. Nous vous recommandons donc d’en confier la surveillance à un salarié en installant le défibrillateur à proximité de son poste. Veillez toutefois à ne pas choisir un poste trop éloigné et peu visible.
Pour être efficace, un défibrillateur automatisé externe doit également être en parfait état de marche. Il est donc impératif de le conserver à une température ambiante de 5°C à +70°C au risque d’abîmer les batteries. Par ailleurs, il est recommandé d’accompagner l’appareil d’un kit contenant :
- une paire de ciseaux pour couper les habits de la victime ;
- du matériel de protection biologique (gants, masques, etc.) ;
- des rasoirs pour raser une victime à forte pilosité afin de mieux appliquer les électrodes.
En outre, il est aussi important que le défibrillateur soit placé le plus près possible d’un téléphone. En effet, un téléphone peut être utile pour communiquer avec les secouristes sur l’état de la victime et recevoir des instructions.
Obligation de maintenance pour les DAE
La maintenance du défibrillateur est une obligation légale. Elle est réglementée par :
- le Décret n° 2001-1154 du 5 décembre 2001 relatif à l’obligation de maintenance et au contrôle de qualité des dispositifs médicaux ;
- l’article L. 123-6 de la loi votée le 13 octobre 2016 par L’Assemblée Nationale ;
- les articles L. 5212-1 et L. 5212-25 du Code de la santé publique.
Ces réglementations font d’une part obligation au fabricant, au fournisseur ou à l’exploitant de procéder à la maintenance du DAE. Pour cela, un contrôle périodique des accessoires de l’appareil tels que les électrodes, le chargeur et la batterie sont indispensables.
Dans la pratique, la maintenance comprend la vérification de la date de validité des accumulateurs et des électrodes ainsi que leur remplacement périodique. Par ailleurs, les défibrillateurs sont dotés d’un témoin lumineux ou d’un indicateur visuel qui permet de vérifier l’état de marche de l’appareil après les autotests journaliers.
En outre, les ERP doivent s’assurer de la réalisation régulière d’un inventaire et de la tenue d’un registre de maintenance pour chaque appareil.
D’autre part, conformément à ces réglementations, la responsabilité civile des exploitants des ERP peut être engagée en cas de non-respect des consignes de maintenance du fabricant du DAE.
Obligation de formation à l’utilisation des défibrillateurs
Il n’existe pas d’obligation de formation à l’utilisation d’un DAE. Ceci serait contraire aux dispositions du décret n°2007-705 du 4 mai 2007.
Toutefois, l’article 4141-3 du Code du travail précise que la formation à la sécurité des sauveteurs secouristes du travail doit porter particulièrement sur les gestes de premiers secours. Cette dernière permet de reconnaître les signes d’une crise cardiaque, de manipuler avec efficacité le DAE et de communiquer des informations fiables aux secours.
Néanmoins, l’obligation de formation à l’utilisation d’un défibrillateur est avant tout morale.
La sanction pour le non-respect de l’obligation de s’équiper en défibrillateur est laissée à l’appréciation du juge. Si ce dernier retient la simple imprudence, l’exploitant peut être condamné à 3 ans d’emprisonnement assortis d’une amende de 45 000 €. Toutefois, en cas de violation flagrante, la peine encourue est de 5 ans d’emprisonnement et 75 000 € d’amende.
Commentaires récents